DIASPORA GRECQUE

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Conséquence de la conquête ottomane au XVe siècle et de sa poursuite pendant les deux siècles suivants (Péloponnèse, XVe-XVIe s.; Chypre, 1571; Crète, 1669), les migrations grecques sont, aux XVIIe et XVIIIe siècles, dues à des pressions économiques et, parfois, démographiques, lorsqu’il existe un déséquilibre entre ressources et effectifs humains dans certaines îles, ainsi que dans des régions continentales. Les principaux pays d’accueil sont l’Italie, l’Autriche et la Hongrie; les vagues de migration atteignent aussi la France, l’Angleterre, la Hollande, la Russie, la Pologne, l’Allemagne; d’autres Grecs vont en Asie et en Afrique, tandis que l’Amérique deviendra un pôle d’attraction, dans un contexte différent, au XIXe et surtout au XXe siècle.

Les premières migrations eurent un caractère spécifique: des nobles, savants et militaires s’installèrent en Italie et, en partie, en France, répondant aux possibilités d’accueil qu’offraient, pour les uns, les cours des princes et le climat intellectuel de la Renaissance, pour les autres, les pratiques militaires de l’époque (stradiots); les établissements ruraux constituaient le débouché des migrations massives, telle celle des Maïnotes en Corse, au XVIIe siècle, et dans les maremmes de Pise et de Sienne. Ces migrations ont été possibles grâce à la structure sociale des populations émigrées, qui permettait leur mobilisation massive, d’une part, et leur cohésion, de l’autre, dans le pays d’accueil. La composition des populations émigrées pour des motifs non économiques contraste avec celle des populations émigrées pour des raisons commerciales; ainsi les registres paroissiaux de Venise au XVIe siècle montrent que la colonie grecque de cette ville était composée, pour l’essentiel, de galeotti (sorte de galériens) et de marins. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les colonies grecques deviennent des colonies proprement marchandes et, en même temps, des centres intellectuels: Venise et Vienne fournissent l’essentiel des éditions grecques pendant la domination ottomane et sont, avec Budapest et Bucarest, les principaux centres de migration intellectuelle.

Naples, Livourne, Ancône et Trieste sont, avec Venise, les principaux points de la migration grecque en Italie: les colonies, dotées de privilèges, se livrent au commerce d’importation et d’exportation ainsi qu’à des opérations de banques et d’assurance maritime (Trieste). Tandis que pendant les deux premiers siècles les émigrants provenaient surtout des possessions vénitiennes en Grèce, à partir du XVIIe siècle la migration résultant de l’activité commerciale touche les régions sous domination ottomane. De gros marchands d’Épire installés à Venise contrôlent un réseau de correspondants commerciaux ou d’associés assurant la diffusion des biens manufacturés importés en Grèce et l’exportation de produits, surtout agricoles. La migration vers les pays d’Europe centrale, elle aussi facilitée par l’octroi de privilèges aux colonies grecques et aux autres colonies balkaniques, provenait de la Grèce du Nord. L’intérêt que les autorités autrichiennes et hongroises manifestaient en faveur du développement du commerce dans leurs pays a permis aux émigrants d’exercer tous les types de commerce (itinérant, sédentaire et de transit) et de s’organiser en sociétés commerciales, bien que le commerce itinérant fût dans certains cas soumis à des restrictions (ventes exclusives aux corporations locales ou dans les foires).

Les colonies dans les centres commerciaux disposaient, pour la plupart, d’un statut accordé par les autorités, avaient leur propre Église, sauf dans le cas de colonies rurales enclines à l’assimilation; elles entretenaient, du fait de leur fonction commerciale, des liens avec leur pays d’origine: ces liens, renforcés par le sentiment d’appartenance à un univers religieux différent de celui du pays d’accueil, caractérisent la diaspora grecque dont le cosmopolitisme n’est pas total. Les Grecs ne viennent pas dans les pays étrangers en apportant des éléments culturels leur permettant l’assimilation, bien que celle-ci ait parfois eu lieu, par exemple en Hongrie; attachés à leur pays, ils y rentrent ou ils prennent une part active aux manifestations organisées en sa faveur: financement de l’enseignement, des éditions, des œuvres de bienfaisance. L’acculturation, loin d’avoir entraîné l’assimilation, est devenue un élément de différenciation dans l’univers culturel dont les émigrants étaient tributaires et a joué un rôle de catalyseur dans le pays d’origine dont certains secteurs économiques et culturels étaient directement liés à la diaspora. Ces liens commerciaux et culturels ont en quelque sorte créé un univers grec qui dépasse les frontières du pays.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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